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HISTOIRE DE FRANCE

des chariots ; les bateaux de vins exquis descendaient le Danube. Le camp de ces croisés fourmillait de femmes et de filles.

Que devenait, pendant ce temps, l’affaire du schisme ? Reprenons d’un peu plus haut.

Longtemps les princes avaient exploité à leur profit la division de l’Église ; le duc d’Anjou d’abord, puis le duc de Berri. Les papes d’Avignon, serviles créatures de ces princes, ne donnaient de bénéfices qu’à ceux qu’ils leur désignaient. Les prêtres erraient, mouraient de faim. Les suppôts de l’Université, les plus savants élèves qu’elle formait, ses plus éloquents docteurs, restaient oubliés à Paris, languissant dans quelque grenier[1].

À la longue pourtant, quand l’Église fut presque ruinée, et que les abus devinrent moins lucratifs, alors, enfin, les princes commencèrent à écouter les plaintes de l’Université. Cette compagnie, enhardie par l’abaissement des papes, prit en main l’autorité ; elle déclara qu’elle avait de droit divin la charge non seulement d’enseigner, mais de corriger et de censurer, de censurer et doctrinaliter et judicialiter, pour parler le langage du temps. Elle appela tous ses membres à donner avis sur la grande question de l’union de l’Église. Tous votèrent, du plus grand au plus petit. Un tronc était ouvert aux Mathurins. Le moindre des pauvres maîtres de Sorbonne, le plus crasseux des cappets de Montaigu, y jeta son vote. On en compta dix

  1. Nous analyserons plus tard le terrible pamphlet de Clémengis.