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JEUNESSE DE CHARLES VI

Les pillards n’eurent qu’à prendre ; draps, toiles, coutils, vaisselle plate, ils vendaient, emballaient, expédiaient chez eux.

Les Gantais, ne pouvant compter sur personne[1], réduits à leurs milices, n’ayant presque point de gentilshommes avec eux, partant, point de cavalerie, se tinrent à leur ordinaire en un gros bataillon. Leur position était bonne (Roosebeke près Courtrai), mais la saison devenait dure (27 novembre 1382). Ils avaient hâte de retrouver leurs poêles. D’ailleurs, les défections commençaient ; le sire de Herzele, un de leurs chefs, les avait quittés. Ils forcèrent Artevelde de les mener au combat.

Pour être sûrs de charger avec ensemble, et de ne pas être séparés par la gendarmerie, ils s’étaient liés les uns aux autres. La masse avançait en silence, toute hérissée d’épieux qu’ils poussaient vigoureusement de l’épaule et de la poitrine. Plus ils avançaient, plus ils s’enfonçaient entre les lances des gens d’armes qui les débordaient de droite et de gauche. Peu à peu, ceux-ci se rapprochèrent. Les lances étant plus longues que les épieux, les Flamands étaient atteints sans pouvoir atteindre. Le premier rang recula sur le second ; le bataillon alla se serrant ; une lente et terrible pression s’opéra sur la masse ; cette force énorme se refoula cruellement contre elle-même. Le sang ne coulait

  1. Les Gantais avaient demandé du secours aux Anglais ; mais, de crainte qu’on ne voulût leur faire payer ce secours, ils réclamèrent les sommes que la Flandre avait autrefois prêtées à Édouard III. Ils n’eurent ni secours ni argent. App. 16.