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L’ANGLETERRE. — AZINCOURT

de Caen, de Meaux, un brave archevêque, celui de Sens, Montaigu, qui se battit comme un lion.

Le fils du duc de Bourgogne fit à tous les morts qui restaient nus sur le champ de bataille la charité d’une fosse. On mesura vingt-cinq verges carrées de terre, et dans cette fosse énorme l’on descendit tous ceux qui n’avaient pas été enlevés ; de compte fait, cinq mille huit cents hommes. La terre fut bénie, et autour on planta une forte haie d’épines, de crainte des loups[1].

Il n’y eut que quinze cents prisonniers, les vainqueurs ayant tué, comme on a dit, ce qui remuait encore. Ces prisonniers n’étaient rien moins que les ducs d’Orléans et de Bourbon, le comte d’Eu, le comte de Vendôme, le comte de Richemont, le maréchal de Boucicaut, messire Jacques d’Harcourt, messire Jean de Craon, etc. Ce fut toute une colonie française transportée en Angleterre.

Après la bataille de la Meloria, perdue par les Pisans, on disait : « Voulez-vous voir Pise, allez à Gênes. » On eût pu dire après Azincourt : « Voulez-vous voir la France, allez à Londres. »

Ces prisonniers étaient entre les mains des soldats. Le roi fit une bonne affaire ; il les acheta à bas prix, et en tira d’énormes rançons[2]. En attendant ils furent tenus de très près. Henri ne se piqua point d’imiter la courtoisie du Prince Noir.

La veuve d’Henri IV, veuve en premières noces du duc de Bretagne, eut le malheur de revoir à Londres

  1. App. 177.
  2. Le Religieux.