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HISTOIRE DE FRANCE

Le duc de Bourgogne accueillit la remontrance. Menacé par les princes, et voyant le dauphin son gendre s’éloigner de lui, il résolut de s’appuyer sur l’Université et sur Paris. Il força le conseil à destituer les financiers, comme l’Université le demandait. Desessarts se sauva, déclarant qu’en effet il lui manquait deux millions, mais qu’il en avait les reçus du duc de Bourgogne.

Celui-ci se trouvait fort intéressé à tenir loin un tel accusateur. Un mois après, il apprend qu’il est revenu, qu’il a forcé le pont de Charenton, et qu’il occupe la Bastille au nom du dauphin. Les conseillers du dauphin s’étaient imaginé que, la Bastille prise, Paris tournerait pour lui contre le duc de Bourgogne. Il en fut tout autrement. Le poste de Charenton, qui assurait les arrivages de la haute Seine et les approvisionnements de la ville, était la chose du monde qui intéressait le plus les Parisiens. L’attaque de ce poste fit croire que Desessarts voulait affamer Paris. Un immense flot de peuple vint heurter à l’hôtel de ville, réclamant l’étendard de la commune, pour aller attaquer la Bastille. Le premier jour, on parvint à les renvoyer[1]. Le second, ils prirent l’étendard et assiégèrent la forteresse. Ils auraient eu peine à la forcer. Mais le duc de Bourgogne aida : il décida Desessarts effrayé à sortir, lui répondant de la vie[2]. Il lui fit une croix sur le dos

  1. Ils respectèrent la courageuse résistance du clerc de l’hôtel de ville.
  2. Le duc lui dit : « Mon ami, ne te soucie, car je te jure que tu n’auras autre garde que de mon propre corps. » Et lui fit la croix sur le dos de la main et l’emmena. (Juvénal.)