Depuis l’assassinat manqué de Clisson, on savait qu’il ne fallait pas croire à la légère qu’un homme était tué ; aussi, selon un autre récit, le grand homme au chaperon rouge vint, avec un falot de paille, regarder à terre si la besogne avait été faite consciencieusement[1]. Il n’y avait rien à dire ; le mort était taillé en pièces, le bras droit était tranché à deux places, au coude, au poignet ; le poing gauche était détaché, jeté au loin par la violence du coup ; la tête était ouverte de l’œil à l’oreille, d’une oreille à l’autre ; le crâne était ouvert, la cervelle épandue sur le pavé[2].
Ces pauvres restes furent portés le lendemain matin, parmi la consternation et la terreur générale[3], à l’église voisine des Blancs-Manteaux. Ce fut au jour seulement qu’on ramassa, dans la boue, la main mutilée et la cervelle. Les princes vinrent lui donner l’eau bénite. Le vendredi, il fut enseveli à l’église des Célestins, dans la chapelle qu’il avait bâtie lui-même[4]. Les coins du drap mortuaire étaient portés par son oncle, le vieux duc de Berri, par ses cousins, le roi de Sicile, le duc de Bourgogne et le duc de Bourbon ; puis, venaient les seigneurs, les chevaliers, une foule innombrable de peuple. Tout le monde pleurait, les ennemis comme les amis[5]. Il n’y a plus d’ennemis alors ; chacun, dans ces moments, devient partial pour le mort. Quoi ! si jeune, si vivant naguère,
- ↑ App. 85.
- ↑ « Lesquelles playes estoient telles et si énormes que le test estoit fendu, et que toute la cervelle en sailloit… Item que son bras destre estoit rompu tant que le maistre os sailloit dehors au droit du coude… » (Information du sire de Tignonville, prévôt de Paris.)
- ↑ App. 86.
- ↑ App. 87.
- ↑ App. 88.