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PHILIPPE-LE-BEL. — BONIFACE VIII

Philippe-le-Hardi avait facilité aux roturiers l’acquisition des biens féodaux. Il enjoignit aux gens de justice « de ne pas molester les non nobles qui acquerront des choses féodales. » Le non-noble ne pouvant s’acquitter des services nobles qui étaient attachés au fief, il fallait le consentement de tous les seigneurs médiats, de degré en degré jusqu’au roi. Philippe III réduisit à trois le nombre des seigneurs médiats dont le consentement était requis.


La tendance de cette législation s’explique aisément quand on sait quels furent les conseillers des rois aux treizième et quatorzième siècles, quand on connaît la classe à laquelle ils appartenaient.

Le chambellan, le conseiller de Philippe-le-Hardi, fut le barbier ou chirurgien de saint Louis, le Tourangeau Pierre La Brosse. Son frère, évêque de Bayeux, partagea sa puissance et aussi sa ruine. La Brosse avait accusé la seconde femme de Philippe III d’avoir empoisonné un fils du premier lit. Le parti des seigneurs, à la tête duquel était le comte d’Artois, soutint que le favori calomniait la reine, et que de plus il vendait aux Castillans les secrets du roi. La Brosse décida le roi à interroger une béguine, ou mystique de Flandre. Le parti des seigneurs opposa à la béguine les dominicains, généralement ennemis des mystiques. Un dominicain apporta au roi une cassette où l’on vit ou crut voir des preuves de la trahison de La Brosse. Son procès fut instruit secrètement. On ne manqua pas de le trouver coupable. Les chefs du parti de la noblesse, le comte