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APPENDICE

sur la terre par sept corps quelconques, retournent, l’expiation ainsi terminée, reprendre leurs premiers corps.

« Il faut savoir en outre que quelques-uns de ces hérétiques s’appelaient Parfaits ou Bons Hommes ; les autres s’appelaient les Croyants. Les Parfaits portaient un habillement noir, feignaient de garder la chasteté, repoussaient avec horreur l’usage des viandes, des œufs, du fromage ; ils voulaient passer pour ne jamais mentir, tandis qu’ils débitaient, sur Dieu principalement, un mensonge perpétuel ; ils disaient encore que pour aucune raison on ne devait jurer. On appelait Croyants ceux qui, vivant dans le siècle, et sans chercher à imiter la vie des Parfaits, espéraient pourtant être sauvés dans la foi de ceux-ci ; ils étaient divisés par le genre de vie, mais unis dans la foi et l’infidélité. Les Croyants étaient livrés à l’usure, au brigandage, aux homicides et aux plaisirs de la chair, aux parjures et à tous les vices. En effet, ils péchaient avec toute sécurité et toute licence, parce qu’ils croyaient que sans restitution du bien mal acquis, sans confession ni pénitence, ils pouvaient se sauver, pourvu qu’à l’article de la mort ils pussent dire un Pater, et recevoir de leurs maîtres l’imposition des mains. Les hérétiques prenaient parmi les Parfaits des magistrats qu’ils appelaient diacres et évêques ; les Croyants pensaient ne pouvoir se sauver s’ils ne recevaient d’eux en mourant l’imposition des mains. S’ils imposaient les mains à un mourant, quelque criminel qu’il fût, pourvu qu’il pût dire un Pater, ils le croyaient sauvé, et, selon leur expression, consolé ; sans faire aucune satisfaction et sans autre remède, il devait s’envoler tout droit au ciel.

« … Certains hérétiques disaient que nul ne pouvait pécher depuis le nombril et plus bas. Ils traitent d’idolâtrie les images qui sont dans les églises, et appelaient les cloches les trompettes du démon. Ils disaient encore que ce n’était pas un plus grand péché de dormir avec sa mère ou sa sœur qu’avec toute autre. Une de leurs plus grandes folies, c’était de croire que si quelqu’un des Parfaits péchait mortellement en mangeant, par exemple, tant soit peu de viande, ou de fromage, ou d’œufs, ou de toute autre chose défendue, tous ceux qu’il avait consolés perdaient l’Esprit-Saint, et il fallait les reconsoler ; et ceux mêmes qui étaient sauvés, le péché du consolateur les faisait tomber du ciel.

« Il y avait encore d’autres hérétiques appelés Vaudois, du nom d’un certain Valdus, de Lyon. Ceux-ci étaient mauvais, mais bien moins mauvais que les autres ; car ils s’accordaient avec nous en beaucoup de choses, et ne différaient que sur quelques-unes. Pour ne rien dire de la plus grande partie de leurs infidélités, leur