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APPENDICE

s’acquitter de leur mission ; ils montèrent au palais, appelé Casher dans la langue du pays, avec une troupe nombreuse d’appariteurs qui marchaient en avant, l’épée à la main et à grand bruit ; on les conduisit à travers des passages étroits et privés de jour, et à chaque porte des cohortes d’Éthiopiens armés rendaient leurs hommages au soudan par des saluts répétés. Après avoir franchi le premier et le second poste, introduits dans un local plus vaste, où pénétrait le soleil, et exposé au grand jour, ils trouvent des galeries en colonnes de marbre, lambrissées d’or et enrichies de sculptures en relief, pavées en mosaïque, et dignes dans toute leur étendue de la magnificence royale ; la richesse de la matière et des ouvrages retenait involontairement les yeux, et le regard avide, charmé par la nouveauté de ce spectacle, avait peine à s’en rassasier. Il y avait aussi des bassins remplis d’une eau limpide ; on entendait les gazouillements variés d’une multitude d’oiseaux inconnus à notre monde, de forme et de couleur étranges, et pour chacun d’eux une nourriture diverse et selon le goût de son espèce. Admis plus loin encore, sous la conduite du chef des eunuques, ils trouvent des édifices aussi supérieurs aux premiers en élégance que ceux-ci l’emportaient sur la plus vulgaire maison. Là était une étonnante variété de quadrupèdes, telle qu’en imagine le caprice des peintres, telle qu’en peuvent décrire les mensonges poétiques, telle qu’on en voit en rêve, telle enfin qu’on en trouve dans les pays de l’Orient et du Midi, tandis que l’Occident n’a rien vu et presque jamais rien ouï de pareil. — Après beaucoup de détours et de corridors qui auraient pu arrêter les regards de l’homme le plus occupé, on arriva au palais même, où des corps plus nombreux d’hommes armés et de satellites proclamaient par leur nombre et leur costume la magnificence incomparable de leur maître ; l’aspect des lieux annonçait aussi son opulence et ses richesses prodigieuses. Lorsqu’ils furent entrés dans l’intérieur du palais, le soudan, pour honorer son maître selon la coutume, se prosterna deux fois devant lui, et lui rendit en suppliant un culte qui ne semblait dû qu’à lui, une espèce d’adoration. Tout à coup s’écartèrent avec une merveilleuse rapidité les rideaux, tissus de perles et d’or, qui pendaient au milieu de la salle et voilaient ainsi le trône ; la face du calife fut alors révélée : il apparut sur un trône d’or, vêtu plus magnifiquement que les rois, entouré d’un petit nombre de domestiques et d’eunuques familiers. » Willelm. (Tyrens., l. XIX, c. xvii.)

Ils menaient par neuf degrés de la religion au mysticisme

Ce mysticisme des Alides leur a souvent fait appliquer à la dévo-