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LOUIS IX

d’Angleterre. Saint Louis s’efforçait d’entraîner tous ses voisins à la croisade, il se portait pour arbitre de leurs différends, il les aidait à s’équiper. Il donna soixante-dix mille livres tournois aux fils du roi d’Angleterre. En même temps, pour s’attacher le Midi, il appelait pour la première fois les représentants des bourgeois aux assemblées des sénéchaussées de Carcassonne et de Beaucaire. C’est le commencement des États du Languedoc.

La croisade était si peu populaire que le sénéchal de Champagne, Joinville, malgré son attachement pour le saint roi, se dispensa de le suivre. Ses paroles, à ce sujet, peuvent être données comme l’expression de la pensée du temps :

« Avint ainsi comme Dieu voult que je me dormis à matines, et me fu avis en dormant que je véoie le roy devant un autel à genoillons, et m’estoit avis que plusieurs prélas revestus le vestoient d’une chesuble vermeille de sarge de Reins. » Le chapelain de Joinville lui expliqua que ce rêve signifiait que le roi se croiserait, et que la serge de Reims voulait dire que la croisade « serait de petit esploit ». — « Je entendi que touz ceulz firent peché mortel, qui li loèrent l’allée. » — « De la voie que il fist à Thunes ne weil-je riens conter ne dire, pource que je n’i fu pas, la merci Dieu[1]. »

Cette grande armée, lentement rassemblée, découragée d’avance et partant à regret, traîna deux mois

  1. Joinville.