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HISTOIRE DE FRANCE

nies mahométanes de Luceria et de Nocéra[1], elle constitua la papauté en état de siège. Alors devait commencer un duel à mort. D’autre part, l’Allemagne ne s’accommoda pas mieux d’un prince tout Sicilien, qui voulait faire prévaloir chez elle le droit romain, c’est-à-dire, le nivellement de l’ancien Empire ; la seule loi de succession, en rendant les partages égaux entre les frères, eût divisé et abaissé toutes les grandes maisons. La dynastie de Souabe fut haïe en Allemagne comme italienne, en Italie comme allemande ou comme arabe ; tout se retira d’elle. Frédéric II vit son beau-père, Jean de Brienne, saisir le temps où il était à la terre sainte, pour lui enlever Naples. Son propre fils, Henri, qu’il avait désigné son héritier, renouvela contre lui la révolte d’Henri V contre son père, tandis que son autre fils, le bel Enzio, était enseveli pour toujours dans les prisons de Bologne[2]. Enfin, son chancelier, son ami le plus cher, Pierre des Vignes, tenta de l’empoisonner. Après ce dernier coup, il ne restait plus qu’à se voiler la tête, comme César aux ides de mars. Frédéric abjura toute ambition, demanda à résigner tout pour se retirer à la terre sainte ; il voulait, du moins, mourir en paix. Le pape ne le permit pas.

Alors le vieux lion s’enfonça dans la cruauté ; au siège de Parme, il faisait chaque jour décapiter quatre de ses prisonniers. Il protégea l’horrible Eccelino, lui

  1. 1223, 1247. Nocéra fut surnommée Nocera de’ Pagani.
  2. À la mort de Corradino il voulut s’échapper, enfermé dans un tonneau ; mais une boucle de ses cheveux le trahit. « Ah ! il n’y a que le roi Enzio qui puisse avoir de si beaux cheveux blonds !… »