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HISTOIRE DE FRANCE

suelle embrassa la chrétienté. Le monde entier apparut à saint Dominique dans le capuchon de la Vierge, comme l’Inde l’a vu dans la bouche de Crishna, ou comme Brama reposant dans la fleur du lotos. « La Vierge ouvrit son capuchon devant son serviteur Dominique qui était tout en pleurs, et il se trouvait, ce capuchon, de telle capacité et immensité qu’il contenait et embrassait doucement toute la céleste patrie. »

Nous avons remarqué déjà à l’occasion d’Héloïse, d’Éléonore de Guyenne et des Cours d’amour, que, dès le douzième siècle, la femme prit sur la terre une place proportionnée à l’importance nouvelle qu’elle avait acquise dans la hiérarchie céleste. Au treizième, elle se trouve, au moins comme mère et régente, assise sur plusieurs des trônes d’Occident. Blanche de Castille gouverne au nom de son fils enfant, comme la comtesse de Champagne pour le jeune Thibault, comme celle de Flandre pour son mari prisonnier. Isabelle de la Marche exerce aussi la plus grande influence sur son fils Henri III, roi d’Angleterre. Jeanne de Flandre ne se contenta pas du pouvoir, elle en voulut les honneurs et les insignes virils ; elle réclama au sacre de saint Louis le droit du comte de Flandre, celui de porter l’épée nue, l’épée de la France[1].

Avant d’expliquer comment une femme gouverna la France et brisa la force féodale au nom d’un enfant, il

  1. Par une singulière coïncidence, en 1250, une femme succédait, pour la première fois, à un sultan (Chegger-Eddour à Almoadan).