Page:Michelet - OC, Histoire de France, t. 2.djvu/381

Cette page a été validée par deux contributeurs.
371
GUERRE DES ALBIGEOIS

lorsqu’arriva du côté du Rhône la principale armée des croisés ; d’autres venaient par le Velay, d’autres par l’Agénois. « Et fut tant grand le siège, tant de tentes que de pavillons, qu’il semblait que tout le monde y fût réuni[1]. » Philippe-Auguste n’y vint pas : il avait à ses côtés deux grands et terribles lions[2], le roi Jean et l’empereur Othon, le neveu de Jean. Mais les Français y vinrent, si le roi n’y vint pas[3] : à leur tête, les archevêques de Reims, de Sens, de Rouen, les évêques d’Autun, Clermont, Nevers, Bayeux, Lisieux et Chartres ; les comtes de Nevers, de Saint-Pol, d’Auxerre, de Bar-sur-Seine, de Genève, de Forez, une foule de seigneurs. Le plus puissant était le duc de Bourgogne. Les Bourguignons savaient le chemin des Pyrénées ; ils avaient brillé surtout dans les croisades d’Espagne. Une croisade prêchée par les moines de Cîteaux était nationale en Bourgogne. Les Allemands, les Lorrains, voisins des Bourguignons, prirent aussi la croix en foule ; mais aucune province ne fournit à la croisade d’hommes plus habiles et plus vaillants que l’Ile-de-France. L’ingénieur de la croisade, celui qui construisait les machines et dirigeait les sièges, fut un légiste, maître Théodise, archidiacre de l’église Notre-Dame de Paris ; c’est lui encore qui fit, à Rome, devant le pape, l’apologie des croisés (1215)[4].

  1. Chron. Langued.
  2. Pierre de Vaux-Cernay.
  3. La religion semblait être devenue plus sombre et plus austère dans le nord de la France. Sous Louis VI, le jeûne du samedi n’était point de règle ; sous son fils Louis VII, il était si rigoureusement observé que les bouffons, les histrions, n’osaient s’en dispenser.
  4. « C’était, dit Pierre de Vaux-Cernay, un homme circonspect, prudent,