Page:Michelet - OC, Histoire de France, t. 2.djvu/371

Cette page a été validée par deux contributeurs.
361
GUERRE DES ALBIGEOIS

Flamands, de l’autre avec les seigneurs du midi de la France, et élevait à sa cour son autre neveu, fils du comte de Toulouse.

Ce comte, le roi d’Aragon et le roi d’Angleterre, suzerains de tout le Midi, semblaient réconciliés aux dépens de l’Église ; ils gardaient à peine quelques ménagements extérieurs. Le danger était immense de ce côté pour l’autorité ecclésiastique. Ce n’étaient point des sectaires isolés, mais une Église tout entière qui s’était formée contre l’Église. Les biens du clergé étaient partout envahis. Le nom même de prêtre était une injure. Les ecclésiastiques n’osaient laisser voir leur tonsure en public[1]. Ceux qui se résignaient à porter la robe cléricale, c’étaient quelques serviteurs des nobles, auxquels ceux-ci la faisaient prendre pour envahir sous leur nom quelque bénéfice. Dès qu’un missionnaire catholique se hasardait à prêcher, il s’élevait des cris de dérision. La sainteté, l’éloquence ne leur imposaient point. Ils avaient hué saint Bernard[2].

La lutte était imminente en 1200. L’église hérétique était organisée ; elle avait sa hiérarchie, ses prêtres, ses évêques, son pape ; leur concile général s’était tenu à Toulouse ; cette ville eût été sans doute leur Rome, et son Capitole eût remplacé l’autre. L’église nouvelle envoyait partout d’ardents missionnaires : l’innovation éclatait dans les pays les plus éloignés, les moins soupçonnés, en Picardie, en Flandre, en Allemagne, en Angleterre, en Lombardie, en Toscane,

  1. Guillem. de Podio Laur.
  2. Id.