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HISTOIRE DE FRANCE

brisant les croix, ne voulant plus de culte que la parole. Ces sectaires, réprimés un instant, reparaissent à Lyon sous le marchand Vaud ou Valdus ; en Italie, à la suite d’Arnaldo de Brescia. Aucune hérésie, dit un dominicain, n’est plus dangereuse que celle-ci, parce qu’aucune n’est plus durable[1]. Il a raison, ce n’est pas autre chose que la révolte du raisonnement contre l’autorité. Les partisans de Valdus, les Vaudois, s’annonçaient d’abord comme voulant seulement reproduire l’Église des premiers temps dans la pureté, dans la pauvreté apostolique ; on les appelait les pauvres de Lyon. L’Église de Lyon, comme nous l’avons dit ailleurs, avait toujours eu la prétention d’être restée fidèle aux traditions du christianisme primitif. Ces Vaudois eurent la simplicité de demander autorisation au pape ; c’était demander la permission de se séparer de l’Église. Repoussés, poursuivis, proscrits, ils n’en subsistèrent pas moins dans les montagnes, dans les froides vallées des Alpes, premier berceau de leur croyance, jusqu’aux massacres de Mérindol et de Cabrières, sous François Ier, jusqu’à la naissance du Zwinglianisme et du Calvinisme, qui les adoptèrent comme précurseurs, et reconnurent en eux, pour leur Église récente, une sorte de perpétuité secrète pendant le moyen âge, contre la perpétuité catholique.

Le caractère de la réforme au douzième siècle[2] fut donc le rationalisme dans les Alpes et sur le Rhône,

  1. « Inter omnes sectas quæ sunt vel fuerunt… est diuturnior. » (Reinerus.)
  2. Nous renvoyons sur ce grand sujet au livre de M. N. Peyrat : Les Réformateurs de la France et de l’Italie au douzième siècle. 1860.