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HISTOIRE DE FRANCE

avait été d’abord surnommé l’Éveillé. Son règne est en effet le réveil de la royauté. Plus vaillant que son père, plus docile à l’Église, c’est pour elle qu’il fit ses premières armes, pour l’abbaye de Saint-Denis, pour les évêchés d’Orléans et de Reims. Si l’on songe que les terres d’Église étaient alors les seuls asiles de l’ordre et de la paix, on sentira combien leur défenseur faisait œuvre charitable et humaine. Il est vrai qu’il y trouvait son compte ; les évêques, à leur tour, armaient leurs hommes pour lui. C’est lui qui protégeait leurs pèlerins, leurs marchands, qui affluaient à leurs foires, à leurs fêtes ; il assurait la grande route de Tours et d’Orléans à Paris, et de Paris à Reims. Le roi et le comte de Blois et de Champagne s’efforçaient de mettre un peu de sécurité entre la Loire, la Seine et la Marne, petit cercle resserré entre les grandes masses féodales de l’Anjou, de la Normandie, de la Flandre ; celle-ci avançait jusqu’à la Somme. Le cercle compris entre ces grands fiefs fut la première arène de la royauté, le théâtre de son histoire héroïque. C’est là que le roi soutint d’immenses guerres, des luttes terribles contre ces lieux de plaisance qui sont aujourd’hui nos faubourgs. Nos champs prosaïques de Brie et de Hurepoix ont eu leurs Iliades. Les Montfort et les Garlande soutenaient souvent le roi ; les Coucy, les seigneurs de Rochefort, du Puiset surtout, étaient contre lui ; tous les environs étaient infestés de leurs brigandages. On pouvait aller encore avec quelque sûreté de Paris à Saint-Denis ; mais au delà on ne chevauchait plus que la lance sur la cuisse ; c’était la sombre et malencon-