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HISTOIRE DE FRANCE

les plus beaux chevaux en Espagne, en Gascogne et en Auvergne[1] ; c’est peut-être lui qui a créé ainsi la belle et forte race de nos chevaux normands. Les Saxons ne bâtissaient point de châteaux[2] ; ainsi une bataille perdue, tout était perdu, ils ne pouvaient plus guère se défendre ; et cette bataille, il était probable qu’ils la perdraient, combattant dans un pays de plaine contre une excellente cavalerie. Une flotte seule pouvait défendre l’Angleterre ; mais celle d’Harold était si mal approvisionnée, qu’après avoir croisé quelque temps dans la Manche, elle fut obligée de rentrer pour prendre des vivres.

Guillaume, débarqué à Hastings, ne rencontra pas plus d’armée que de flotte. Harold était alors à l’autre bout de l’Angleterre, occupé de repousser les Danois. Il revint enfin avec des troupes victorieuses, mais fatiguées, diminuées, et, dit-on, mécontentes de la parcimonie avec laquelle il avait partagé le butin. Lui-même était blessé. Cependant le Normand ne se hâta point encore. Il chargea un moine d’aller dire au Saxon qu’il se contenterait de partager le royaume avec lui : « S’il s’obstine, ajouta Guillaume, à ne point prendre ce que je lui offre, vous lui direz, devant tous ses gens, qu’il est parjure et menteur, que lui et tous ceux qui le soutiendront sont excommuniés de la bouche du pape, et que j’en ai la bulle[3]. » Ce message produisit son effet. Les Saxons doutèrent de leur cause. Les frères même d’Harold l’engagèrent à ne pas com-

  1. Guillaume de Poitiers.
  2. Orderic Vital.
  3. Chronique de Normandie.