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TABLEAU DE LA FRANCE

Auvergne et Guyenne ; de l’autre, celles de Languedoc et Provence, Bourgogne et Champagne, enfin celles de Picardie et de Flandre, où les deux systèmes se rattachent. Paris est le sensorium.

La force et la beauté de l’ensemble consistent dans la réciprocité des secours, dans la solidarité des parties, dans la distribution des fonctions, dans la division du travail social. La force résistante et guerrière, la vertu d’action est aux extrémités, l’intelligence au centre ; le centre se sait lui-même et sait tout le reste. Les provinces frontières, coopérant plus directement à la défense, gardent les traditions militaires, continuent l’héroïsme barbare, et renouvellent sans cesse d’une population énergique le centre énervé par le froissement rapide de la rotation sociale. Le centre, abrité de la guerre, pense, innove dans l’industrie, dans la science, dans la politique ; il transforme tout ce qu’il reçoit. Il boit la vie brute, et elle se transfigure. Les provinces se regardent en lui ; en lui elles s’aiment et s’admirent sous une forme supérieure ; elles se reconnaissent à peine :

« Miranturque novas frondes et non sua poma. »

Cette belle centralisation, par quoi la France est la France, elle attriste au premier coup d’œil. La vie est au centre, aux extrémités ; l’intermédiaire est faible et pâle. Entre la riche banlieue de Paris et la riche Flandre, vous traversez la vieille et triste Picardie ; c’est le sort des provinces centralisées qui ne sont pas