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plot autrichien. Je remontai plus haut. Je donnai un fil sur pour l’histoire de cinquante années : la Conspiration de famille. Je montrai que, non seulement par Marie-Antoinette, Ghoiseul et les traités de 1756, mais bien avant, et dès Fleury, l’étranger régna à Versailles, — bien plus, que le roi fut constamment l’étranger [1].

C’est là le grand courant de l’histoire, et le fil général. Ceux qui voulaient durer et garder le pouvoir, comme Fleury, Choiseul, savaient parfaitement qu’il fallait se ranger au grand courant, ne pas s’en écarter, se soucier fort peu de la France, être bon Espagnol, bon Autrichien, servir la pensée fixe, l’intérêt de famille.

Louis XV écrivait tous les jours à Madrid, à sa fille l’Infante. La grande affaire de sa vie fut de faire reine cette fille, ou mieux, de faire impératrice la fille de sa fille, qui épouserait Joseph II De là vient que le roi, de cœur très espagnol, devient très autrichien, l’Autriche étant la seule maison où celle de Bourbon puisse se marier sans déroger. Joseph II naît à peine qu’il est le mari projeté, désiré, de Versailles et Madrid. Prise énorme pour Vienne. La catholique Autriche, par un ministre philosophe, Choiseul, met la France en chemise, amuse l’opinion, mystifie Versailles et Ferney.

  1. Est-ce à un étranger qu’on doit remettre l’épée, l’armée et le salut ? grosse question. — Un livre spécial là-dessus, un livre fort, est parti de Zurich, livre amer, mais salubre et sain (chose aujourd’hui si rare), plein de réveil et plein de vie, dont plus d’un dormeur vibrera. (Marc Dufraisse, Histoire du droit de guerre et de paix, de 1789 à 1815. Paris, édit. Lechevalier.)