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HISTOIRE DE FRANCE

animée, et d’une vie étincelante ; l’histoire et la réalité n’y sont que prose et platitude, un carnaval d’histrions et de faux dieux ridicules, un empyrée de Scarron.

Marie de Médicis, qui avait vingt-sept ans quand Henri IV l’épousa, était une grande et grosse femme, fort blanche, qui, sauf de beaux bras, une belle gorge, n’avait rien que de vulgaire. Sa taille élevée ne l’empêchait pas d’être fort bourgeoise et la digne fille des bons marchands ses aïeux. Même son père, son oncle qui la maria, tout princes qu’ils étaient (par diplôme), n’en faisaient pas moins le commerce et l’usure.

D’italien, elle n’avait que la langue ; de goût, de mœurs et d’habitudes, elle était Espagnole ; de corps, Autrichienne et Flamande. Autrichienne par sa mère, Jeanne d’Autriche ; Flamande par son grand-père, l’empereur Ferdinand, frère de Charles-Quint. Donc, cousine de Philippe II, de Philippe III, de ces rois blêmes et blondasses, aux yeux de faïence, tristes personnages que Titien et Vélasquez gardent encore sur leurs toiles dans toute la triste vérité.

Elle était née en pleine réaction jésuitique. Sa mère, Jeanne d’Autriche, fut une de ces filles de l’Empereur qui créèrent et patronnèrent les Jésuites en Allemagne, fondèrent leurs collèges, leur mirent en main les enfants des princes et de la noblesse. La première et la seule chose que Marie demanda au roi, à son débarquer en France, fut d’y faire rentrer les Jésuites.

Deux choses la rendaient désirable, non au roi, qui s’en souciait peu, mais désirable aux ministres : c’était