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ÉCLAIRCISSEMENTS

anciennes religions de la Gaule. Plusieurs traits, d’ailleurs, sont profondément indigènes et portent le caractère d’une haute antiquité : ainsi, le culte du feu, le mythe du castor et du grand lac, etc., etc.


§ Ier.

Le peu que nous savons des vieilles religions de l’Irlande nous est arrivé altéré, sans doute, par le plus impur mélange de fables rabbiniques, d’interpolations alexandrines, et peut-être dénaturé encore par les explications chimériques des critiques modernes. Toutefois, en quelque défiance qu’on doive être, il est impossible de repousser l’étonnante analogie que présentent les noms des dieux de l’Irlande (Axire, Axcearas, Coismaol, Cabur) avec les Cabires de Phénicie et de Samothrace (Axieros, Axiokersos, Casmilos, Cabeiros). Baal se retrouve également comme Dieu suprême en Phénicie et en Irlande. L’analogie n’est pas moins frappante avec plusieurs des dieux égyptiens et étrusques. Æsar, dieu en étrusque (d’où Cæsar), c’est en irlandais le dieu qui allume le feu[1]. Le feu allumé, c’est Moloch. L’Axire irlandais, eau, terre, nuit, lune, s’appelle en même temps Ith (prononcez Iz comme Isis), Anu Mathar, Ops et Sibhol (comme Magna Mater, Ops et Cybèle). Jusqu’ici c’est la nature potentielle, la nature non fécondée : après une suite de transformations, elle devient, comme en Égypte, Neith-Nath, dieu-déesse de la guerre, de la sagesse et de l’intelligence, etc.

M. Adolphe Pictet établit pour base de la religion primitive de l’Irlande le culte des Cabires, puissances primitives, commencement d’une série ou progression ascendante qui s’élève jusqu’au Dieu suprême, Beal. C’est donc l’opposé direct d’un système d’émanation.

« D’une dualité primitive, constituant la force fondamentale de l’univers, s’élève une double progression de puissances cosmiques, qui, après s’être croisées par une transition mutuelle, viennent toutes se réunir dans une unité suprême comme en leur principe essentiel. Tel est, en peu de mots, le caractère

  1. Suivant Bullet, Lar, en celtique, signifie feu. En vieil irlandais il signifie le sol d’une maison, la terre, ou bien une famille (?). — Lere, tout-puissant. — Joun, iauna, en basque Dieu (Janus, Diana). En Irlandais, Anu, Ana (d’où Jona ?) mère des Dieux, etc., etc.