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PRÉFACE DE 1869

infaillible. On avait par exemple épelé, déchiffré l’Égypte, fouillé ses tombes, non retrouvé son âme. Le climat pour les uns, pour d’autres tels symboles de subtilité vaine, c’était l’explication. Moi je l’ai prise au cœur d’Isis, dans les douleurs du peuple, l’éternel deuil et l’éternelle blessure de la famille du fellah, dans sa vie incertaine, dans les captivités, les razzias d’Afrique, le grand commerce d’hommes, de Nubie en Syrie. L’homme enlevé au loin, lié aux durs travaux, l’homme fait arbre ou attaché à l’arbre, cloué, mutilé, démembré, c’est l’universelle Passion de tant de dieux (Osiris, Adonis, Iacchus, Atys, etc.). Que de Christs, et que de Calvaires ! que de complaintes funèbres ! Que de pleurs sur tout le chemin (Voy. la petite Bible, 1864).

Je n’ai eu nul autre art en 1833. Une larme, une seule jetée aux fondements de l’église gothique, suffit pour l’évoquer. Quelque chose en jaillit d’humain, le sang de la légende, et, par ce jet puissant, tout monta vers le ciel. Du dedans au dehors, tout ressortit en fleurs, — de pierre ? non, mais des fleurs de vie. — Les sculpter ? approcher le fer et le ciseau ? j’en aurais eu horreur et j’aurais cru en voir sortir du sang !

Voulez-vous bien savoir pourquoi j’étais si tendre pour ces dieux ? c’est qu’ils meurent. Tous