terre, et les mains qui la cultivaient, cette terre, devenaient chaque jour plus rares et moins habiles.
Rien de plus terrible que le tableau que nous a laissé Lactance de cette lutte meurtrière entre le fisc affamé et la population impuissante qui pouvait souffrir, mourir, mais non payer. « Tellement grande était devenue la multitude de ceux qui recevaient en comparaison du nombre de ceux qui devaient payer, telle l’énormité des impôts, que les forces manquaient aux laboureurs, les champs devenaient déserts, et les cultures se changeaient en forêts… Je ne sais combien d’emplois et d’employés fondirent sur chaque province, sur chaque ville, Magistri, Rationales, vicaires des préfets. Tous ces gens-là ne connaissaient que condamnations, proscriptions, exactions ; exactions, non pas fréquentes, mais perpétuelles, et dans les exactions d’intolérables outrages… Mais la calamité publique, le deuil universel, ce fut quand le fléau du cens ayant été lancé dans les provinces et les villes, les censiteurs se répandirent partout, bouleversèrent tout : vous auriez dit une invasion ennemie, une ville prise d’assaut. On mesurait les champs par mottes de terre, on comptait les arbres, les pieds de vigne. On inscrivait les bêtes, on enregistrait les hommes. On n’entendait que les fouets, les cris de la torture ; l’esclave fidèle était torturé contre son maître, la femme contre son mari, le fils contre son père ; et faute de témoignage, on les torturait pour déposer contre eux-mêmes ; et quand ils cédaient, vaincus par la douleur, on écrivait ce qu’ils n’avaient pas dit. Point d’excuse