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MON JOURNAL.

Tous les autres parlementaires semblent avoir désespéré de la cause, ce qui est un moyen de la perdre. Leurs discours s’adressent à la France. Benjamin Constant, dans cette occasion comme dans bien d’autres, a saisi la dernière planche de salut. Il s’est adressé au centre ; il a pensé, avec raison, que plusieurs de ces hommes qui le composent, sont faibles mais honnêtes, ou du moins ne sont pas assez pervertis pour accepter un peu d’argent, ou risquer de faire éclater une révolution Ils ont dû lui savoir gré de ce témoignage de confiance.

On dit, que si l’on eût voté après ce discours, les libéraux auraient eu pour eux, contre la loi, une forte majorité. Mais comment compter sur des hommes si faibles et si changeants [1] !

J’ai vu ce matin Poret et je vous comparais, en pensée, l’un à l’autre. Il est impossible que deux hommes assez ressemblants par les qualités du cœur, diffèrent plus par leurs manières. Mais je ne sais si vous êtes supérieurs l’un à l’autre.

II m’a semblé moins exclusif que je ne croyais. Il pense avec Royer-Collard et ton serviteur, qu’il y a des ultra-libéraux, comme des ultra-royalistes, et que ceux-là, une fois l’opposition victorieuse,

  1. Le discours de Benjamin Constant portait sur la réforme de la loi électorale ; nous allons y revenir. Mme J. M.