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MON JOURNAL.


à la vérité, mais bien minutieuses, bien embarrassantes pour qui y cherche le droit.

Compare cette étude qui est la mienne [1], à celle du plus rebutant cadavre, et tu trouveras, si tu examines bien, que la laideur morale l’emporte de beaucoup sur la laideur physique. Les œuvres des hommes, où apparaissent, à chaque instant, la bizarrerie du préjugé, l'astuce ou la tyrannie, sont plus repoussantes que cette matière qui peut choquer les sens, mais où la main divine est manifestement empreinte.

L’histoire est plus triste, plus misérable encore ; les actions des hommes ont toujours été pires que leurs lois.

Voilà la route que je suis. Quant au but, le discours de Benjamin Constant m’y fait penser. Toutes les ressources du talent, je dirai presque du génie, mises en jeu pour échouer devant deux ou trois grimauds qui vont décider du sort de la France.

Il est beau et puissant, ce style qui semble toujours retenir la force. Il y a de l’esprit dans ce discours et du plus vigoureux. C’est bien là ce que j’attendais. Il est, dans un autre genre, à la hauteur de celui de Royer-Collard ; et, venant d’un chef de parti, il a dû trouver plus d’obstacles.

  1. Michelet, qui étudiait alors le droit, s’attacha bientôt à cette étude. Elle l’achemina insensiblement vers Vico, vers Grimm et les Origines du droit, un de ses meilleurs ouvrages. Mme J. M.