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MON JOURNAL.

Je crois que la métaphysique et les mathématiques sont des sciences auxquelles il faut s’adonner sérieusement ou ne pas s’en mêler. Je neveux pas dire qu’on doive les pousser loin ; mais il faut apprendre rapidement ce qu’on veut savoir et couper cette étude par le moins d’occupations possibles : 1° parce que ces sciences étant une suite de propositions dont la dernière est la conséquence de celle qui précède, il est important de n’en pas rompre la chaîne ; 2° parce que ne se rattachant pas, ainsi que la plupart des sciences physiques, aux actions et aux circonstances de notre vie, leurs notions s’effacent plus facilement si elles ne sont pas serrées de près et ne se fortifient pas mutuellement.

La lecture de Condillac m’a rappelé un temps déjà loin de nous, celui où tu allais le lire à la bibliothèque du Panthéon. Il m’arriva deux ou trois fois de t’y accompagner ; moi je lisais Mérope et Mahomet. Il me souvient que, tout en admirant Condillac, il t’arrivait quelquefois de bâiller dessus. Je crois que cela venait de ce que tu envisageais l’ouvrage partiellement. Il te paraissait très beau, mais néanmoins il t’ennuyait. Tout ceci est un peu long, un peu monotone pour un journal, mais enfin, tu le veux, le voilà.

Paul POINSOT.