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MON JOURNAL.


n’ont rien de certain. S’il y a erreur, elle reste irréparable. La seconde raison, c’est que la vue des exécutions augmente chez le peuple les instincts féroces, au lieu de les réprimer. Elle produit sur ceux qui en sont témoins, une sorte de vertige, un entraînement à commettre des crimes tout semblables. On a une foule d’exemples de cette, contagion morale. Peut-on aussi tuer un homme hors le cas de légitime défense ? Ce droit est faiblement établi même au point de vue légal. Dieu seul a droit de défaire son ouvrage. En outre, la mort frappant le coupable, presque aussitôt après son crime, il n’a pas eu le temps de faire entrer, la lumière dans sa conscience et de se repentir. Il s’en va donc méchant dans l’autre vie. Une dernière considération s’impose. Presque tous les meurtriers ont une faible tête et sont maniaques. Il devrait y avoir toujours un ou deux médecins parmi les juges afin d’établir l’état mental de l’accusé.

C’est surtout dans les délits politiques, jugés avec tant de passion, que la peine de mort doit être abolie [1].

  1. On voit, par le mois et l’année, 1820, que Michelet, à vingt et un ans, guidé par le sens moral et celui de la justice, commença le premier, en ce siècle, le plaidoyer que d’autres devaient reprendre plus tard avec tant d’éclat.