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MON JOURNAL.


naître et que je vivrais encore dans ta pensée par une sorte de présence réelle.

Adieu.
J. MICHELET.


P. S. Lundi de Pentecôte. — Je suis allé ce matin chez M. Villemain, où j’ai trouvé un homme de ses amis, élégant, spirituel, assez fat. C’était un jeune avocat, fort libéral. Je l’ai écouté longtemps en silence, me félicitant de n’être pas ce brillant parleur. Je serais peu propre à ce métier-là. J’aimerais assez la célébrité du nom, mais l’obscurité de la personne. Au lieu d’amoindrir son esprit dans la discussion de misérables intérêts privés, mieux vaut vivre dans un petit coin, faire quelques bonnes actions et un bon livre qui soit encore une action meilleure.

J. M.



M. F... sort d’ici. La vive impression qu’a faite sur lui la vue de la guillotine m’a suggéré plusieurs réflexions sur la peine de mort, qu’il faudrait abolir. La première raison qui le commande, c’est que l’accusé, niant le plus souvent jusqu’à la fin, il faut, pour le condamner, s’appuyer sur des preuves plus ou moins vraisemblables, mais qui