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DE MES IDÉES.

En vérité, il y avait dans tout cet ensemble de quoi remplir la vie d’un homme. Dans cette même année (1819) je lirai au sort et j’y tombai. Le 28 décembre, jour de la révision, je fus exempté pour la trop grande délicatesse des extrémités, ce qui tenait aux jeûnes de mon enfance. Je n’avais pu ni grandir, ni me fortifier. L’exemption fixait ma destinée. Désormais je n’allais plus avoir d’autres événements que le progrès de mes idées. Pour échapper à la monotonie, il faudrait fouiller, creuser. Lorsqu’on va ainsi en profondeur, c’est comme pour les sources. On n'en cherchait qu’une, et voilà qu’il en vient d’autres et beaucoup plus abondantes, sur lesquelles on n’avait pas compté. Ainsi naît la variété dans une vie en apparence trop uniforme.


1820


Rien que des lectures. La Grèce, la Bible, l’Évangile. Je commence les mathématiques qui bientôt me passionnent. Le départ de Poinsot, mes courses à Bicêtre, les lettres fréquentes que nous nous écrivions, le Journal et le Mémorial [1] que je

  1. Le Journal pour le présent ; le Mémorial racontait le passé, les années de l’enfance et de la première jeunesse.