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MON JOURNAL.


l’enfant au pays. La décadence d’un peuple est toujours précédée de la dissolution du foyer.

Avons-nous, d’ailleurs, tant que cela besoin d’avoir plusieurs femmes à la fois, et d’aller de l’une à l’autre pour varier nos plaisirs ? L’oisit seul peut songer à ce libertinage. L’homme qui dépense tout le jour ses forces à des œuvres viriles, ne pense guère à courir, le soir, après les femmes. Il a suffisamment de la sienne. Voilà mon thème. Le piquant, serait de prouver que nous sommes en train de devenir des Orientaux, c’est-à-dire, des propres à rien. Cette idée n’est pas si paradoxale qu’elle en a l’air. Il n’est que trop réel qu’une certaine couche de la société, dans notre Occident, par suite de ces habitudes énervantes, s’enfonce dans la somnolence et la sénilité. Des eunuques, pour tout dire, sans la mutilation.



Depuis que Mme Rousseau est devenue, en quelque sorte, l’unique directrice de la maison, ses qualités sérieuses se sont affirmées. Tant il est vrai, que la femme appartient au foyer dont elle est la suprême harmonie. En voyant combien, mon père et moi, nous serions incapables de régler nos affaires d’intérieur, je sens plus profondément cette vérité, que le rôle de la femme dans la fa-