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MON JOURNAL.


tins sur tout ce que je venais de voir. Ensuite, j’ai achevé l'Andromaque d’Euripide, puis, quelques pages de Clodius, et le plus long jour de Tannée a passé comme un rêve à la fois triste, beau et doux. En voyant, de la fenêtre qui regarde du côté du cimetière, descendre la nuit silencieuse et s’éteindre, peu à peu, les dernières lueurs d’un chaud crépuscule je songeais à ceux qui sont là-haut et me disais : « Il doit faire bon dormir son dernier sommeil, ainsi englouti sous les roses ! »

Jeudi 28. — Je suis allé ce matin chez M. Leclerc reprendre mes vers grecs. Il en a été si content qu’il les a lus successivement à Théry et à Cousin. Celui-ci venait de sortir. J’en ai eu à peu près toute la conversation. Il a parlé avec un souverain de Rousseau. Encouragé par les éloges d’un maître si peu prodigue de louanges, je suis monté chez M. Villemain. Lui, sans marchander, s’est fort récrié sur mon érudition grecque. Je rentrais donc chez moi assez plein d’orgueil. Foret, qui lisait en m’attendant ma Mort de Pline [1] m’a rendu plus modeste. Il en trouve la rédaction franchement mauvaise, avec raison. Sa sévérité habituelle a toujours pour effet, au premier moment, de m’irriter parce que

  1. Sujet de prix proposé par l’Académie ; il ne fut pas achevé.