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MON JOURNAL.


foi catholique, Christ est mort pour sauver le monde, s’il est ressuscité pour remonter au ciel amenant avec lui les âmes bienheureuses qu’il venait de racheter, la fête des morts ne peut être qu’une fête de résurrection. Elle devrait donc venir logiquement, non pas en novembre quand la saison s’achève dans la mélancolie attristée d’une destinée qui finit, mais bien mieux, au moment de l’année où tout veut repartir, revivre, s’élancer vers la lumière. C’est-à-dire, au printemps, à Pâques fleuries. Si l’Église eût fait cela, notre imagination au lieu de s’enténébrer de pensées de deuil, et de chercher les morts où ils ne sont plus, n’aurait recueilli de son culte touchant, que des pensées consolantes et fécondes. Elle n’aurait vu dé tous côtés, au-dessus des tombes, que des âmes en route pour le ciel. Heureuses, celles de ces âmes qui se seraient fait, par toutes sortes de bonnes actions, de belles ailes rapides et légères pour monter plus vite à Dieu. Je vois que le peuple de Paris, si exact à visiter les cimetières, le jour de la Toussaint, y revient de lui-même à Pâques, comme s’il voulait associer ses morts à la joie qu’il a de sortir des tristesses de l’hiver et de se sentir revivre. Il faudrait tenir compte de l’instinct des foules.