Page:Michelet - Mon journal, 1888.djvu/148

Cette page n’a pas encore été corrigée
106
MON JOURNAL.


débattre pour moi le prix d’un Théocrite, et je lui dis résolument, qu’il peut y mettre les quatorze francs que demande le libraire. Heureusement Je l’ai rattrapé en route.... Cela m’a fait rire de moi-même.

Jeudi 5. — Ce qui est à regretter dans l’humble métier que je fais, c’est le temps, ce sont les heures perdues en courses pour aller d’une leçon à l’autre. Que me reste-t-il pour l’étude ? Les jeudis, les dimanches, les soirées ? Mais presque toujours je tombe de lassitude. Et puis, je suis né si dormeur ! Il faudrait pourtant arriver à se lever tous les matins dès quatre heures. J’aurais alors, ne partant qu’à six, un moment délicieux pour le travail [1].

Dimanche 8. — Jamais je n’éprouvai autant qu’aujourd’hui le besoin de revoir Poinsot. Son amitié m’éclaircit les ombres. Je suis parti par un temps charmant, le soleil encore chaud pour la saison. Mais la campagne a pris un air sévère. Ce n’est plus cet accueil aimable, engageant que nous font

  1. Michelet prit, en effet, bientôt, cette bonne habitude qu’il a gardée toute sa vie. Même âgé, il se levait bravement à cinq heures pour travailler jusqu’à onze. Le plus dur était de s’attacher, au cœur de l’hiver, en pleine nuit. Aussi comme on saluait avec joie le 1er janvier qui donnait l’espoir de voir croître les jours ! Mme J. M.