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MON JOURNAL.


POINSOT A MICHELET.


15 juillet.


J’ai suivi ton conseil et m’en suis bien trouvé. Aujourd’hui, après mon dîner, je suis allé faire un tour de campagne et m’asseoir en face de Gentilly, sur cette route, plantée de jeunes peupliers et bordée d’un petit ruisseau où nous nous sommes assis il y a environ trois semaines. Cet endroit a déjà pris pour moi le charme du souvenir. J’avais un livre de médecine, mais je n’ai pu lire qu’après m’être remémoré toute la conversation que nous avons eue là sur Bonaparte.

Je regardais quelquefois devant moi, et je voyais un homme qui mettait du foin en meule. Il avait un air de paix et de tranquillité qui me faisait envie. De temps en temps il s’arrêtait pour regarder son ouvrage avec une satisfaction visible. Un silence délicieux, qui n’était troublé que par le bruit des cigales et les derniers chants des oiseaux, s’accordait très bien avec le calme profond de mon âme et me disposait, malgré moi, à la rêverie. Aussi ai-je peu lu. Jamais, je crois, je n’avais eu une impression plus agréable des douceurs de la vie champêtre....

Huit heures sonnent et la brume commence à