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dans cette vivante lumière qui rétablit leur primitive, leur si naturelle unité !

Si elle n’a plus le bonheur de le contenir palpitant au fond de son sein, en récompense elle a cet enchantement, cette féerie, de l’avoir en face d’elle sous son avide regard. Penchée sur lui, elle tressaille. Jeune et innocente qu’elle est, par les signes les plus naïfs elle révèle sa jouissance de s’assimiler par l’amour ce fruit divin d’elle-même. Naguère, il s’est nourri d’elle ; maintenant elle se nourrit de lui, l’absorbe, le boit et le mange. Échange délicieux de la vie ; l’enfant la donne et la reçoit, absorbant sa mère à son tour, comme lait, comme chaleur et lumière.

Grande, très-grande révélation. Ce n’est pas ici un vain spectacle d’art et de sensibilité, simple volupté du cœur et des yeux. Non, c’est un acte de foi, un mystère, mais non absurde, la base sérieuse et solide de religion, d’éducation, sur lequel va s’élever tout le développement de la vie humaine. Quel est ce mystère ? Le voici :

Si l’enfant n’était pas Dieu, si le rapport de la mère à lui n’était pas un culte, il ne vivrait pas. — C’est un être si fragile, qu’on ne l’eût jamais élevé s’il n’eût eu dans cette mère la merveilleuse idolâtrie qui le divinise, qui lui rend doux et désirable, à elle, de s’immoler pour lui. Elle le voit beau, bon