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communiquer sans cesse. Il faut que la langue muette de l’amour, sa communion, reprenne son caractère sacré, qui exclut tout plaisir égoïste, implique le concours de deux volontés.

La casuistique, qui n’eut ni cœur ni âme, n’a point stipulé pour la femme. Mais aujourd’hui c’est l’homme même, dans sa justice généreuse, qui doit plaider pour elle, s’il le faut, contre lui. Elle a droit à trois choses :

1o Nulle grossesse sans son consentement exprès. À elle seule de savoir si elle peut accepter cette chance de mort. Si elle est malade, épuisée, mal conformée, son mari doit l’épargner, au temps surtout où l’œuf vient au-devant (pendant les règles et les dix jours qui suivent). Le temps intermédiaire est-il stérile ? Il doit l’être, puisque l’œuf manque. Mais, si la passion l’évoquait et le faisait reparaître ? M. Coste pense qu’il en est ainsi, au moins pour les trois jours qui précèdent les règles. C’est aussi l’opinion du Mémoire couronné par L’Académie des sciences.

2o On doit à la femme ce respect d’amour de n’en pas faire un instrument passif. Nul plaisir, sinon partagé. Un médecin catholique de Lyon, professeur autorisé, dans un livre populaire de cette année, émet cette opinion grave, que le fléau qui décime les femmes tient surtout à ce que, mêmes mariées, la plupart sont veuves. Solitaire dans le plaisir même, l’égoïste impatience de l’homme ne veut que pour soi-même et ne veut qu’un moment, n’éveille l’émotion que pour la laisser avorter. Commencer et toujours en vain, c’est défier la maladie, irriter le corps, sécher l’âme. La femme subit cela, mais est triste, ironique, et son aigreur altère son sang. Sauf quelques paroles d’affaires, plus de société ; au fond, plus de mariage. Il n’est réel que dans une culture régulière de ce devoir de cœur, dans la communauté des émotions salutaires qui renouvellent la vie. Qu’elle manque, et les époux s’éloignent, se déshabituent l’un de l’autre. Plaignons l’enfant, car la famille se dissout. — Est-ce à dire que l’homme soit