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luxe aimable de formes qui renouvelle sa fraîcheur et l’appesantit un peu. Sa blanche et abondante gorge, où ses enfants ont bu la vie, ces trésors que celui même qui sans doute les connaît le mieux couve pourtant du regard, tout cela rend la chère femme un peu lente, un peu paresseuse. On la voit bientôt fatiguée ; on lui défend de travailler. Mais on travaille pour elle. Ses enfants, gais et heureux, son mari tout ému d’elle, ne peuvent rencontrer des fleurs sans les rapporter, les donner à la souveraine rose. On en remplit son tablier, on en charge son sein, sa tête. Elle disparaît sous la pluie odorante : « Assez ! assez ! » Mais qui l’écoute ? Elle a peine à y voir encore, et ne peut plus se défendre. Elle est enveloppée d’eux, et submergée de caresses, noyée de baisers, de fleurs.




La chaleur est déjà forte. Ces ardeurs ne laissent pas de l’inquiéter, la tendre épouse. Les trois mois qui vont se passer, de la fenaison aux vendanges, sont pesants, terribles à l’homme. Celui qui travaille des bras, et l’ouvrier de la pensée, sont frappés également. Il frappe durement, fortement au cerveau, le puissant soleil. Et cela, de deux façons. En même temps qu’il nous soustrait