Page:Michelet - La femme.djvu/333

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Que tu as bien fait ! que je t’en sais gré !… Oh ! la femme, le vase fragile de l’incomparable albâtre où brûle la lampe de Dieu, il faut bien le ménager, le porter d’une main pieuse ou le garder au plus près dans la chaleur de son sein !

C’est en lui sauvant les misères du travail spécial où s’usent tes jours, cher ouvrier, que tu la tiens dans cette noblesse qu’ont seuls les enfants et les femmes, aimable aristocratie de l’espèce humaine. Elle est ta noblesse, à toi, pour te relever de toi-même. Si tu reviens de ta forge, haletant, brisé d’efforts, elle, jeune et préservée, elle te verse la jeunesse, te rend un flot sacré de vie, et te refait Dieu, d’un baiser.

Près de cet objet divin, tu ne suivras pas à l’aveugle l’entraînement qui te retient sur ton âpre et étroit sentier. Tu sentiras à chaque instant l’heureuse nécessité d’élever, d’étendre tes conceptions, pour suivre ta chère élève là où tu l’as fait monter. Ton jeune ami, ton écolier, comme elle dit modestement, ne te permet pas, ô maître, de t’enfermer dans ton métier. Elle te prie à chaque instant d’en sortir et de l’aider, de rester en harmonie avec toute chose noble et belle. Pour suffire aux humbles besoins de ton petit camarade, tu seras forcé d’être grand.