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battue ! et souvent, qui pis est, enceinte ! La voilà, pour une année, traînant sa double souffrance, au chaud, au froid, glacée du vent, recevant la pluie tout le jour.




La plupart meurent de phthisie, surtout dans le Nord (voir les statistiques). Nulle constitution ne résiste à cette vie. Pardonnons-lui à cette mère, si elle a envie que sa fille souffre moins, si elle l’envoie à la manufacture (du moins elle aura un toit sur la tête), ou bien, domestique à la ville, où elle participera aux douceurs de la vie bourgeoise. L’enfant n’y est que trop portée. Toute femme a dans l’esprit des petits besoins d’élégance, de finesse, d’aristocratie.

Elle en est tout d’abord punie. Elle ne voit plus le soleil. La bourgeoise est souvent très-dure, surtout si la fille est jolie. Elle est immolée aux enfants gâtés, singes malins, cruels petits chats, qui font d’elle leur jouet. Sinon, accusée, grondée, vexée, malmenée. Alors elle voudrait mourir. Le regret du pays lui vient ; mais elle sait que son père ne voudra jamais la reprendre. Elle pâlit, elle dépérit.

Le maître seul est bon pour elle. Il la con-