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N’est-ce pas un spectacle à faire songer que de voir tout autour de nous la femme, jeune et charmante, frappée dans l’amour même, condamnée aux refus, aux fuites involontaires, ou (contraste odieux) donnant le plaisir dans les pleurs ? Désolante situation, qui de bonne heure assombrit le mariage, et bientôt le supprime ; qui fait craindre la génération. On frémit d’engendrer, quand on sait qu’aux épreuves de la maternité le mal s’aigrit, s’aggrave. Aux épanchements les plus tendres des cœurs qui ne font qu’un, apparaît un tiers, la douleur, l’effroi de l’avenir (et la mort !) entre deux baisers.

Ce fléau marqua moins jadis, d’abord, parce qu’on mourait plus vite et qu’on comptait moins la douleur ; mais aussi pour une autre cause. La femme, nullement affinée, vivant moins de vie cérébrale, pouvait réagir davantage physiquement contre les chagrins et contre les mauvais traitements. J’appelle ainsi surtout ce que doucereusement on nomme empressements amoureux, mais qu’il faut mieux nommer, les exigences du plaisir égoïste qui veut trop, qui veut mal et ne s’informe pas des temps ni des souffrances. — Celle-ci, faible et délicate, ressent tout et profondément. Il n’y a pas à rire ici. Il faut une sérieuse attention, c’est-à-dire un amour de tous les moments. Ce que je di-