Page:Michelet - La femme.djvu/264

Cette page a été validée par deux contributeurs.

celle de sa femme, souvent gardée par un contrat, reste à part. Voilà pourquoi elle règne et fait ce qu’elle veut. Elle tire ses garçons du collège, pour les mettre je ne sais où. Elle donne sa fille à celui qui lui plaît. — Moi, par exemple, qui suis-je ? que serai-je ? ou que ferai-je ? Je ne le sais pas encore. Cela dépend d’une femme. Je suis favorisé de loin ; mais, de près, si je vais montrer la moindre audace d’esprit, elle aura peur, cette mère, reculera, gardera sa fille pour un homme posé et rangé. »

Il a raison, ce jeune homme. Une grande responsabilité, en ce moment, est à la mère. Elle a une énorme puissance pour faire ou défaire. Un mot d’elle peut opérer une profonde transformation. Le héros peut se ranger, devenir le bon sujet. D’autre part aussi, sur ce mot, s’il lui affermit le courage, un cœur jeune, amoureux, d’un seul bond, peut devenir grand.

Vous êtes femme et jeune encore, madame, mais déjà dans cette seconde jeunesse où augmente la prudence, où bien des choses ont pâli, où l’on se défie de la vie. De grâce, n’imposez pas déjà tant de sagesse à ceux-ci. N’exigez pas que ce jeune homme commence par la vieillesse. Vous l’aimiez, vous preniez plaisir à ses lettres enthousiastes. Eh bien, acceptez-le lui-même, comme il est, jeune et chaleureux. Votre fille n’y perdra pas. Agissez un peu