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mains, empereurs et sénateurs, ils éclatent, dominent, et ce sont les Grecs qui semblent les maîtres du monde. Les basses passions qui marquent les bustes de l’Empire (les Agrippa, les Vitellius, etc.) n’apparaissent pas encore chez leurs nobles devanciers. Une sérénité sublime est l’attribut de ces fils de l’idéal. Leur front a encore le reflet dont l’aurore illuminait le faîte de l’acropole d’Athènes, tandis que leurs yeux profonds indiquent, non la molle rêverie, mais la perçante intuition et le mâle raisonnement.

Tu as lu les Vies de Plutarque ; tu cherches ici tes grands morts, objets de ta prédilection. Ces biographies de la décadence, intéressantes et romanesques, nous donnent une idée très-contraire au génie de l’antiquité. Elles proclament le héros, l’intronisent et le divinisent. Or, la beauté de la Cité grecque, c’est d’être un monde héroïque où l’on ne voit point de héros. Nul ne l’est, et tous le sont. Par la gymnastique du corps et par celle de l’esprit, tout citoyen doit obtenir l’apogée de sa beauté, atteindre la hauteur héroïque, ressembler de très-près aux dieux. D’une incessante activité, par les combats, ou les disputes de la place et de l’école, par le théâtre, par les fêtes qui sont des jeux et des combats, l’homme évoque de sa nature tout ce qu’elle a de beau, de fort, se sculpte infatigablement à l’i-