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principaux instituts militaires de l’Europe. Kosciusko fut de ce nombre. Il fut envoyé à l’académie militaire de Versailles, puis à Brest, pour étudier la fortification et la tactique navale. Enfin il passa quelque temps à Paris.

C’était vers 1770, ou à peu près. Jamais, pour les lettres et les arts, la France ne fut plus brillante. La grande période philosophique, ouverte par l’Esprit des lois, continuée par l’Emile, se fermait glorieuse ment avec la défense de Sirven et de Calas. Par Voltaire et Rousseau, la France avait en quelque sorte le pontificat de l’humanité. Un doux esprit de bienveillance, de philanthropie et de liberté semblait d’ici se répandre en Europe.

L’âme du jeune Polonais s’abreuva profondément à cette coupe, et se pénétra de l’amour des hommes. : IL resta le fils de ce temps, le fils de la France d’alors. Les temps terribles qui suivirent, les plus extrêmes nécessités, ses périls, ceux de la patrie, ne purent le faire dévier de la ligne tracée par la philosophie française : humanité et tolérance. Il y resta fidèle aux dépens de la victoire et de la vie.

Il était à Paris au moment du premier partage, quand la Pologne, qui essayait de se réformer elle-même et de prendre une vie meilleure, en fut punie par ses voisins et disséquée vivante. Kosciusko revint, âgé de vingt-six ans, et reçut en arrivant une inutile épée de capitaine d’artillerie, et des canons pour n’en rien faire. Il n’y avait pas cependant, à chercher bien