Page:Michelet - La Pologne martyr, Dentu, 1863.djvu/70

Cette page n’a pas encore été corrigée

infatigable ; il donnait à la musique tout le temps dont il pouvait disposer. C’était un de ces petits gentilshommes, innombrables en ce pays, qui n’ont rien que leur épée, et vivent dans la domesticité des grands, ou de l’exploitation rurale de quelque noble domaine. Client des princes Czartoryski, il avait servi dans un régiment d’artillerie pendant trente années de paix. Retiré, il cultivait un domaine du comte Flemming, beau-père d’un Czartoryski.

Cette famille, qui avait entrepris la tâche difficile de réformer la nation en présence de l’ennemi, et pour ainsi dire sous la main des Russes, cherchait de fous côtés des hommes. Elle n’avait jamais perdu de vue les Kosciusko ; c’est elle qui fit placer le jeune Thadée Kosciusko, né en 1746, à l’école des cadets, que le roi stanislas-auguste venait de fonder à varsovie.

Kosciusko y arrivait déjà préparé. Enfant, il était plein d’ardeur, avide d’apprendre, d’agir ; il semblait que l’action, toujours ajournée pour le père dans la longue période oisive où s’était écoulée sa vie, s’était comme accumulée, et qu’elle éclatait dans son fils. Affamé d’études, dans son désert, il profita des leçons d’un vieil oncle qui avait beaucoup voyagé et qui venait quelques mois par an à la ferme de son père. Il apprit de lui un peu de dessin, de mathématiques, de langue française. En. même temps, il lisait tout seul les Hommes illustres de Plutarque, il en faisait des

extraits, il s’assimilait le génie héroïque de l’antiquité.

L’enfant sauvage