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C’est leur triomphe ; ils le mènent ; lui font visiter leur plage, contempler leur mer, jouissent de son admiration. Car tout cela est à eux. L’Océan où ils se baignent, ils en ont pris possession et se plaisent à lui en faire part.

La femme redevient tout aimable, bienveillante à cette foule même qui jusqu’ici l’inquiétait. Elle se sent si bien près de lui, tellement dans son harmonie ! Elle est plus qu’en sécurité, elle est brave ; elle est familière avec la mer, avec la vague. Elle assure qu’elle va nager : « elle veut dompter la mer. » Ambition un peu bien forte. Elle est tout d’abord primée par son concurrent, son enfant, tout autrement leste et hardi. Se croyant tenue, elle nage. Autrement, elle a peur, enfonce…

Elle se dédommagera à force de bains. Car elle est tombée amoureuse de la mer ; elle en est jalouse. Cette mer, en effet, ne fait pas de médiocres passions. Je ne sais quelle ivresse électrique est en elle, qu’on voudrait tout absorber.