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n’est semblable à sa sœur ; toutes sont inimitables par le délicat velouté.

En voici une, sans ombrelle, qui laisse flotter une nuée de filets légers, floconneux, à peine teintée d’un gris d’argent ; cinq filets s’échappent plus longs, richement colorés de cerise. Ils ondulent, se nouent, se dénouent, s’enchevêtrent aux cheveux d’argent, en faisant sous l’eau de charmants mirages. Ce n’est rien pour nos sens grossiers ; c’est beaucoup pour celle où la vie nerveuse, le fin génie maladif de la femme vibre à toute chose. À ces couleurs rougissantes, pâlissantes, tour à tour, elle se sent et se reconnaît, elle sent la flamme de la vie, qui flamboie, brille et s’éteint. Attendrissante vision ! Elle replonge ses regards au charmant petit océan, et elle y voit mieux la Nature, mère féconde, mais si sévère, qui, à se dévorer soi-même, semble trouver une âpre joie.

Elle resta bien rêveuse, oppressée de cette pensée. La femme ne serait pas la femme, c’est-à-dire le charme du monde, si elle n’avait un don touchant : La tendresse pour toute vie, la pitié et ses belles larmes.

Elle ne pleurait pas encore, mais était si près de pleurer ! L’enfant le vit. Étant déjà, comme ils sont, attentifs, de sens rapide, il se tut. Ils revinrent silencieux.