Page:Michelet - La Mer, 1875.djvu/280

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Très souvent on ne peut passer ; on trouve une barre de glace. Alors les rôles changent. La barque portait l’homme, et maintenant il porte la barque, la prend sur son épaule, traverse la glace craquante et se remet à flot plus loin. Parfois des monts flottants, venant à sa rencontre, n’offrent entre eux que d’étroits corridors qui s’ouvrent, se ferment tout à coup. Il peut y disparaître, s’ensevelir vivant, il peut, de moment en moment, voir les deux murs bleuâtres, s’approchant, peser sur sa barque, sur lui, d’une si épouvantable pression, qu’il en soit aminci jusqu’à l’épaisseur d’un cheveu. Un grand navire eut cette destinée. Il fut coupé en deux, les deux moitiés écrasées, aplaties.



Ils assurent que leurs pères ont pêché la baleine. Moins misérables alors, leur terre étant moins froide, ils s’ingéniaient mieux, avaient du fer sans doute. Peut-être il leur venait de Norvège ou d’Islande. Les baleines ont toujours surabondé aux mers du Groënland. Grand objet de concupiscence pour ceux dont l’huile est le premier besoin. Le poisson la donne par gouttes, et le phoque à flots ; la baleine en montagne.