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du monde. Mais dans ces premiers essais, qu’elle semble peu justifiée ! On dirait que la méduse fut créée pour chavirer.

Chargée d’en haut, d’en bas mal assurée, elle est faite à l’opposé de la physalie, sa parente. Celle-ci n’a au-dessus de l’eau qu’un petit ballon, une vessie insubmersible, et laisse traîner au fond ses longs tentacules, infiniment longs, de vingt pieds ou davantage, qui l’assurent, balayent la mer, frappent le poisson de torpeur, le lui livrent. Légère et insouciante, gonflant son ballon nacré, teinté de bleu ou de pourpre, elle lance, par ses grands cheveux de sinistre azur, un subtil venin dont la décharge foudroie.

Moins redoutables, les vélelles ne peuvent périr non plus. Elles ont la forme de radeaux ; leur petite organisation est déjà un peu solide ; elles savent se diriger, tourner au vent la voile oblique. Les porpites, qui ne semblent qu’une fleur, une marguerite, ont pour elles leur légèreté ; elles flottent même après leur mort. Il en est de même de tant d’êtres fantastiques et presque aériens, guirlandes à clochettes d’or ou guirlandes de boutons de roses (physsophore, stéphanomie, etc.), ceintures azurées de Vénus. Tout cela nage et surnage invinciblement, ne craint que la terre, vogue au large, dans la grande mer, et, si violente qu’elle