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qui, par l’instinct du génie, créa, organisa, nomma, ce qu’on ne savait guère encore, la classe des Invertébrés.

Une classe ? mais c’est un monde, c’est l’abîme de la vie molle et demi-organisée à qui manque encore la vertèbre, la centralisation osseuse, le soutien essentiel de la personnalité. Ils intéressent d’autant plus, car visiblement ils commencent tout. Humbles tribus, jusque-là négligées ! Réaumur, dans les insectes, avait mis les crocodiles. Le glorieux comte de Buffon ne daigna savoir les noms de cette populace infime ; il les laissa hors du Versailles olympien qu’il élevait à la Nature. Ils attendirent jusqu’à Lamarck, ces grands peuples obscurs, confus, ces exilés de la science, qui pourtant remplissent tout, ont tout préparé. C’étaient justement les aînés qu’on avait empêchés d’entrer. Les admis, à les compter, auraient été peu de chose. Si l’on veut juger par le nombre, on pouvait dire que l’exclue, oubliée, laissée à la porte, c’était la Nature elle-même.



Le génie des métamorphoses venait d’être émancipé par la botanique et par la chimie. Ce fut une chose hardie, mais féconde, de prendre Lamarck