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l’Empire, et les ramenant tous à la règle de saint Benoît.

C’est une loi de l’histoire : un monde qui finit, se ferme et s’expie par un saint. Le plus pur de la race en porte les fautes, l’innocent est puni. Son crime, à l’innocent, c’est de continuer un ordre condamné à périr, c’est de couvrir de sa vertu une vieille injustice qui pèse au monde. À travers la vertu d’un homme, l’injustice sociale est frappée. Les moyens sont odieux ; contre Louis le Débonnaire, ce fut le parricide. Ses enfants couvrirent de leurs noms les nations diverses qui voulaient s’arracher de l’Empire.

L’infortuné qui vient prêter sa vie à cette immolation d’un monde social, qu’il s’appelle Louis le Débonnaire, Charles Ier ou Louis XVI, n’est pas pourtant toujours exempt de tout reproche. Sa catastrophe toucherait moins s’il était au-dessus de l’homme. Non, c’est un homme de chair et de sang comme nous, une âme douce, un esprit faible, voulant le bien, faisant parfois le mal, livré à ce qui l’entoure, et vendu par les siens.


Le saint Louis du neuvième siècle[1] comme celui du treizième, fut nourri dans les pensées de la croisade

  1. Il y a une singulière ressemblance entre les portraits que l’histoire nous a laissés de Louis le Débonnaire et de saint Louis. « Imperator erat… manibus longis, digitis rectis, tibiis longis et ad mensuram gracilibus, pedibus longis. » Theganus, de Gest. Ludov. Pii, c. xix, ap. Scr. Fr. VI, 78. — « Ludovicus (saint Louis) erat subtilis et gracilis, macilentus, convenienter et longus, habens vultum anglicum (angelicum ?), et faciem gratiosam. » Sa-