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HISTOIRE DE FRANCE.

mides par les pluies, les inondations, les boues profondes, s’opiniâtra à poursuivre la guerre pendant l’hiver. Alors plus de feuilles qui dérobent le proscrit, les marais durcis par la glace ne le défendent plus ; le soldat l’atteint, isolé dans sa cabane, au foyer domestique, entre sa femme et ses enfants, comme la bête fauve tapie au gîte et couvrant ses petits.

La Saxe resta tranquille pendant huit ans. Witikind lui-même s’était rendu. Mais les Francs ne manquèrent pas pour cela d’ennemis. Les nations dépendantes n’étaient rien moins que résignées. Dans le palais même, ce semble, les Thuringiens tirèrent l’épée contre les Francs qui, à l’occasion du mariage d’un de leurs chefs, voulaient les assujettir aux lois saliques. Cette cause, et d’autres encore qui nous sont peu connues, provoqua une conjuration des grands contre Charlemagne. Ils détestaient surtout, dit-on, l’orgueil et la cruauté de sa jeune épouse Fastrade, à qui un mari de cinquante ans ne savait rien refuser. Les conjurés, découverts, ne nièrent pas ; l’un d’eux eut l’audace de dire : « Si l’on m’eut cru, tu n’aurais jamais passé le Rhin vivant. » Le souverain débonnaire leur imposa pour toute peine quelques lointains pèlerinages aux tombeaux des saints, mais il les fit tuer sur les routes. Quelques années après, un fils naturel de Charlemagne s’associa aux grands pour renverser son père.

Autre conjuration au dehors entre les princes tributaires. Les Bavarois et les Lombards étaient deux peuples frères. Les premiers avaient longtemps donné des rois aux seconds. Tasillon, duc de Bavière, avait